Les plus grands maux sont ceux qui viennent de la tête, dit un vieux proverbe basque.
En Suisse, 1 décès sur 10 résulte d’une «attaque cérébrale» (contre 3 sur 10 de lésions cardiaques). Et les séquelles d’attaques non mortelles peuvent être lourdes. Faute de traitement spécifique, l’accent doit porter sur la prévention.
Il s’agit essentiellement de prévention secondaire, par un médicament: instituée après un premier incident, elle recourt surtout à l’aspirine et réduit d’un quart environ le risque de rechute. La question d’une prévention primaire par l’aspirine a été posée: faudrait-il administrer ce médicament actif à chacun, au-delà d’un certain âge? Les essais réalisés en ce sens n’ont pas donné de résultats satisfaisants, les effets indésirables de l’aspirine pesant davantage, en l’occurrence, que les éventuels bénéfices théoriques. La prévention primaire des accidents vasculaires cérébraux se fonde donc sur d’autres moyens, tels que traitement de l’hypertension artérielle, mesures d’hygiène (tabac, alcool).
La migraine est une affection fréquente également. Et là encore le traitement n’est souvent pas aussi efficace qu’on pourrait le souhaiter. D’ailleurs, ce constat n’est pas nouveau. En 1860, le très populaire vulgarisateur médical parisien Raspail remarque que la migraine, avant l’invention de l’eau sédative, était l’une des principales branches du commerce médical et avait donné lieu à une spécialité professionnelle; les médecins des belles dames à migraine n’auraient pas échangé leur branche de commerce avec celle des plus grands chirurgiens. L’apparition de l’eau sédative porta d’abord un rude coup à cette spécialité médicale et ne contribua pas peu à provoquer ce soulèvement de passions et d’hostilités brutales qui ont accueilli à son début la propagation de la nouvelle méthode: dissiper en un instant un mal qui mettait au lit souvent pour huit jours l’homme le plus robuste, et appelait au moins une fois par jour le médecin auprès de la chaise longue d’une petite maîtresse, ce n’était pas le moyen d’obtenir la faveur de qui trouvait un ample gain à visiter le souffrant de ce mal si lucratif. Faut-il préciser que Raspail était un zélateur de l’eau sédative, mélange d’ammoniaque, d’alcool camphré et de sel de cuisine...
Alors, comment va la tête, aujourd’hui? On sait bien reconnaître tant les attaques cérébrales que les migraines, et en partie les prévenir ou retarder leur apparition. Quant au traitement, convenons qu’il reste du chemin à parcourir pour que la tête aille mieux encore.